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28 janvier 2012

Catechèse à l'école de Marie (5)

Commentaire sur 'La Vraie Dévotion' de Montfort ( 90 - 110)

Les dévotions ne sont pas toutes valables

Il est à remarquer que Montfort, reconnu pour son admiration pour Marie, nous appelle à être critiques quant aux dévotions mariales. Il précise : il y a des formes de dévotion qui induisent en erreur. Les adjectifs qu’il utilise attirent l’attention :"la grande et solide dévotion" (60,62),"les véritables dévotions" (90), "la vraie dévotion" (91) contrairement aux "fausses dévotions" (90). Il a parfois une manière directe de décrire certaines personnes qui fait penser au langage des prophètes dans la Bible, parfois de Jésus lui-même, et je devine que c’est voulu.

"Vraie" dévotion

D’où lui vient cette certitude pour prétendre qu’il prêche la dévotion vraie et authentique ?
Il en a donné une justification dans les numéros 60-89 : nous n’avons pas d’autre point de
départ que celui de la Bible, à savoir la double donnée : le fait que Dieu est venu vers son
peuple et puis la manière dont Il l’a fait.
La dévotion ou la piété est la réponse de l’homme à la proposition concrète de Dieu
et en ce qui concerne cette proposition il n’y a pas le choix.
À vrai dire il est possible d’y répondre de plusieurs manières, plus ou moins intense,
mais choisir une autre relation avec Dieu est une utopie. 
D’où le choix du mot ‘vraie’ dévotion, toute autre piété
est issue d’une image erronée de Dieu, et cela arrive souvent. Voilà son point de vue.
Vous vous souvenez peut-être encore du titre probable de son livre : Préparation au Règne
de Jésus Christ.
La dévotion chez lui n’est rien d’autre que le dévouement à ce Règne.
Le mot ‘dévotion’ le restitue bien : ‘se dévouer’, s’appliquer à, collaborer à…
Afin d’y parvenir au mieux, Marie est une aide précieuse, Montfort nous le rappelle
de plusieurs manières.

Une terminologie délicate

Il ne ménage pas ses mots. En réalité il ne veut pas déclencher de polémique,
mais il donne à réfléchir.
Notez les expressions: “Je trouve sept sortes de faux dévots et de fausses
dévotions à la Sainte Vierge, à savoir: 1º les dévots critiques; 2º les dévots scrupuleux;
3º les dévots extérieurs; 4º les dévots présomptueux; 5º les dévots inconstants;
6º les dévots
hypocrites; 7º les dévots intéressés”. 
L’auteur n’a pas la prétention de faire ici de la haute théologie, il veut être clair et précis.
L’attaque est menée hardiment (les numéros 92-104). Avoir une haute opinion de soi-même,
vivre des doutes, se limiter à des rites extérieurs, être instable comme une girouette, sauver
les apparences, s’imaginer que l’on peut acheter l’amour de Dieu… toutes des attitudes
humaines ! On s’y reconnait parfois !

Des portraits pointus

Les ‘dévots critiques’ sont fiers de leur érudition et de leur perspicacité.
Ils en déduisent qu’ils ont raison et que les autres ont tort. 
Ils veulent bien accepter que Dieu a impliqué Marie
dans son grand projet de sauver l’humanité, mais ils reculent devant des expressions
extérieures de la foi et trouvent la piété populaire ridicule.
Les 'dévots scrupuleux' craignent de déshonorer le Fils en honorant sa Mère,
et que par conséquent la dévotion mariale soit de l’idolâtrie. 
Ils ne comprennent pas qu’une prière à la
Vierge Marie puisse être un moyen pour aboutir à une relation plus intime avec Jésus.
Les ‘dévots extérieurs’ vont dans la direction opposée :
leur dévotion mariale se limite à des gestes extérieurs. 
Montfort donne des exemples : “Ils diront force de chapelets à la hâte,
entendront plusieurs messes sans attention, iront aux processions sans dévotion,
se mettront de toutes confréries mariales sans amendement de leur vie…”
Ce qui les attire c’est d’être incorporés dans un groupe, sans en vivre la spiritualité.
Les ‘dévots présomptueux’ s’imaginent d’être corrects :
“Sous prétexte qu'ils sont dévots à la Vierge,
ils dorment en paix dans leurs mauvaises habitudes,
sans faire beaucoup d’effort pour se corriger. 
Ils comptent sur le fait que Dieu va les pardonner…
Ils sont dévots à la Sainte Vierge, c’est ce qu’ils prétendent,
parce qu’ils portent le scapulaire; qu'ils disent tous les jours
sans reproche et sans vanité sept Pater et sept Ave en son honneur;
qu'ils disent même quelquefois le chapelet…  ceci est suffisant,
pensent-ils, et se réfèrent à des histoires qu’ils
ont entendues ou lues, vraies ou fausses, peu importe. ”
“Les ‘dévots inconstants’ sont dévots à la Sainte Vierge
par intervalles et par boutades:
tantôt ils sont fervents et tantôt ils sont tièdes,
tantôt ils paraissent prêts à tout faire pour son service,
et puis, un peu après ils ne sont plus les mêmes…
Ils changent volontiers d’avis.”
Ils ne tiennent pas compte qu’ils ont conclu une alliance à leur baptême,
et s’en soucient fort peu.
Pour établir un portait des ‘dévots hypocrites’,
l’auteur se limite à quelques mots, mais suffisamment clairs. 
Par leurs pratiques de dévotions, ils veulent se faire passer pour ce
qu’ils ne sont pas.  Ils tiennent à être vus et à se faire passer
pour des personnes pieuses.
Leur dévotion est orientée vers les hommes,
elle n’a rien à voir avec de la piété, mais est plutôt de l’autoglorification.
Les ‘dévots intéressés’ prennent refuge auprès de Marie
seulement quand ils en ont besoin : gagner un procès, un danger imminent,
une maladie… “sans quoi ils l'oublient” précise Montfort. Par contre,
s’ils sont vraiment consacrés au Royaume de Jésus, dira-t-il plus loin,
ils peuvent pleinement compter sur la bienveillance maternelle de Marie.

La dévotion ‘véritable’

À quoi peut-on donc reconnaître la véritable dévotion mariale ?
Remarquez qu’ici Montfort n’en donne que des propriétés
et ne précise pas encore en quoi elle existe.
Intérieure.
La vraie dévotion mariale découle d’une compréhension correcte
de l’agir de Dieu envers les hommes et du rôle qu’Il attribue à Marie.
Cette compréhension mène à la respecter
et à s’attacher à elle.
Tendre. La vraie dévotion mariale est un fruit de la simplicité et de la confiance.
En effet, Jésus lui-même en est le fondement, lorsque, sur la Croix,
Il donna à Marie la mission d’être
‘mère’ pour le disciple et qu’Il demanda au disciple de l’accepter comme ‘mère’.
Il s’agit d’un don précieux aux pauvres croyants de tous les temps.
Une relation mère-enfant est
caractérisée par une confiance extrême.
À temps et à contretemps, l’enfant compte sur sa mère et se jette dans ses bras.
Sainte. En s’adressant à Marie de la bonne manière, elle réagit et se met à l’œuvre.
Pensez à la façon dont Montfort relate la mission qu’elle a reçue du Saint Esprit :
“Jetez les racines de toutes vos vertus dans mes élus,
afin qu’ils croissent de vertu en vertu, de grâce en grâce”
(cf. 34). On va lui ressembler de plus en plus, elle qui est ‘pleine de grâces’.
Constante. La vraie dévotion mariale aide à tenir dans la foi et à ne pas se laisser influencer.
La Parole de Dieu, sa promesse, est la pierre angulaire de la prière, de la confiance.
Lors d’un moment d’inconstance, de peur ou de tristesse, Marie vient à l’aide.
Elle renforce la confiance
en Dieu et soutient la constance.
Désintéressée. La connaissance de l’agir de Dieu et la décision de travailler
avec Jésus à l’avènement du Royaume, contribuent à discerner ce qui
est le plus important.  On ne cherchera pas à avoir la meilleure place dans le ciel,
et encore moins à siéger à la droite ou
à la gauche de Jésus, mais à collaborer avec Lui.
Etre disponible comme Marie autant sur le Calvaire qu’au noces de Cana, dit Montfort.

Il s’agit d’un comble de dévotion, qui en est capable ? Sans aide, vous n’y arriverez
pas. 
Montfort vous indiquera de précieux moyens. Nous en parlerons la prochain
e
fois.



Frans Fabry

Les dévotions ne sont pas toutes valables.

VD 60 - 62 - 90 - 91


Nous lisons avec vous:

60. Ayant jusqu'ici dit quelque chose de la nécessité que nous avons de la dévotion à la Très Sainte Vierge, il faut dire en quoi consiste cette dévotion; ce que je ferai, Dieu aidant, après que j'aurai présupposé quelques vérités fondamentales, qui donneront jour à cette grande et solide dévotion que je veux découvrir.

62. Si donc nous établissons la solide dévotion de la Très Sainte Vierge, ce n'est que pour établir plus parfaitement celle de Jésus-Christ, ce n'est que pour donner un moyen aisé et assuré pour trouver Jésus-Christ. Si la dévotion à la Sainte Vierge éloignait de Jésus-Christ, il faudrait la rejeter comme une illusion du diable; mais tant s'en faut qu'au contraire, comme j'ai déjà fait voir et ferai voir encore ci-après: cette dévotion ne nous est nécessaire que pour trouver Jésus-Christ parfaitement et l'aimer tendrement et le servir fidèlement.

90. Ces cinq vérités présupposeées, il faut maintenant plus que jamais faire un bon choix de la vraie dévotion à la Très Sainte Vierge: car il y a plus que jamais de fausses dévotions à la Sainte Vierge, qu'il est facile de prendre pour de véritables dévotions. Le diable, comme un faux monnayeur et un trompeur fin et expérimenté, a déjà tant trompé et damné d'âmes par une fausse dévotion à la Très Sainte Vierge, qu'il se sert tous les jours de son expérience diabolique pour en damner beaucoup d'autres, en les amusant et endormant dans le péché, sous prétexte de quelques prières mal dites et de quelques pratiques extérieures qu'il leur inspire. Comme un faux monnayeur ne contrefait ordinairement que l'or et l'argent et fort rarement les autres métaux, parce qu'ils n'en valent pas la peine, ainsi l'esprit malin ne contrefait pas tant les autres dévotions que celles de Jésus et de Marie, la dévotion à la Sainte Communion et la dévotion à la Sainte Vierge, parce qu'elles sont, parmi les autres dévotions, ce que sont l'or et l'argent parmi les métaux.

91. Il est donc très important de connaître, premièrement, les fausses dévotions à la Très Sainte Vierge pour les éviter, et la véritable pour l'embrasser; secondement, parmi tant de pratiques différentes de la vraie dévotion à la Sainte Vierge, quelle est la plus parfaite, la plus agréable à la Sainte Vierge, la plus glorieuse à Dieu et la plus sanctifiante pour nous, afin de nous y attacher.

"Vraie Dévotion"

La dévotion chez Montfort n’est rien d’autre que le dévouement à ce Règne. Le mot ‘dévotion’ le restitue bien : ‘se dévouer’, s’appliquer à, collaborer à… Afin d’y parvenir au mieux, Marie est une aide précieuse, Montfort nous le rappelle de plusieurs manières.

Une terminologie délicate

Montfort ne ménage pas ses mots.
En réalité il ne veut pas déclencher de polémique, 

mais il donne à réfléchir.
Notez les expressions: “Je trouve sept sortes de faux dévots
et de fausses dévotions à la Sainte Vierge,

à savoir: 1º les dévots critiques; 2º les dévots scrupuleux;
3º les dévots extérieurs;

4º les dévots présomptueux; 5º les dévots inconstants;
6º les dévots hypocrites;
7º les dévots intéressés”. 
L’auteur n’a pas la prétention de faire ici de la haute théologie,
il veut être clair et précis.
L’attaque est menée hardiment (les numéros 92-104).
Avoir une haute opinion de soi-même,
vivre des doutes, se limiter à des rites extérieurs, être instable comme une girouette, 
sauver les apparences,
s’imaginer que l’on peut acheter l’amour de Dieu… toutes des attitudes humaines !

On s’y reconnait parfois !

Des portraits pointus - VD 92 - 104

Nous lisons avec vous les numéros 92 - 104:



92. Je trouve sept sortes de faux dévots et de fausses dévotions à la Sainte Vierge, savoir: 1º les dévots critiques; 2º les dévots scrupuleux; 3º les dévots extérieurs; 4º les dévots présomptueux; 5º les dévots insconstants; les dévots hypocrites; 7º les dévots intéressés.

93. Les dévots critiques sont, pour l'ordinaire, des savants orgueilleux, des esprits forts et suffisants, qui ont au fond quelque dévotion à la Sainte Vierge, mais qui critiquent presque toutes les pratiques de dévotion à la Sainte Vierge que les gens simples rendent simplement et saintement à cette bonne Mère, parce qu'elles ne reviennent pas à leur fantaisie. Ils révoquent en doute tous les miracles et histoires rapportés par des auteurs dignes de foi, ou tirés des chroniques des ordres religieux, qui font foi des miséricordes et de la puissance de la Très Sainte Vierge. Ils ne sauraient voir qu'avec peine des gens simples et humbles à genoux devant un autel ou image de la Sainte Vierge, quelquefois dans le coin d'une rue pour y prier Dieu; et ils les accusent d'idolâtrie, comme s'ils adoraient le bois ou la pierre; ils disent que, pour eux, ils n'aiment point ces dévotions extérieures et qu'ils n'ont pas l'esprit si faible que d'ajouter foi à tant de contes et historiettes qu'on débite de la Sainte Vierge. Quand on leur rapporte les louanges admirables que les saints Pères donnent à la Sainte Vierge, ou ils répondent qu'ils ont parlé en orateurs, par exagération, ou ils donnent une mauvaise explication à leurs paroles.
Ces sortes de faux dévots et de gens orgueilleux et mondains sont beaucoup à craindre et ils font un tort infini à la dévotion à la Très Sainte Vierge, et en éloignent les peuples d'une manière efficace, sous prétexte d'en détruire les abus.

94. Les devôts scrupuleux sont des gens qui craignent de déshonorer le Fils en honorant la Mère, d'abaisser l'un en élevant l'autre. Ils ne sauraient souffrir qu'on donne à la Sainte Vierge des louanges très justes, que lui ont données les saints Pères; ils ne souffrent qu'avec peine qu'il y ait plus de monde à genoux devant un autel de la Sainte Vierge que devant le Saint-Sacrement, come si l'un était contraire à l'autre; comme si ceux qui prient la Sainte Vierge ne priaient pas Jésus-Christ! Ils ne veulent pas qu'on parle si souvent de la Sainte Vierge et qu'on s'adresse si souvent à elle.
Voici quelques sentences qui leur sont ordinaires: A quoi bon tant de chapelets, tant de confréries et de dévotions extérieures à la Sainte Vierge. Il y a en cela bien de l'ignorance. C'est faire une mômerie de notre religion. Parlez-moi de ceux qui sont dévots à Jésus-Christ (ils le nomment souvent sans se découvrir, je le dis par parenthèse): il faut recourir à Jésus-Christ, il est notre unique médiateur; il faut prêcher Jésus-Christ, voilà le solide!
Ce qu'ils disent est vrai dans un sens; mais par rapport à l'application qu'ils en font, pour empêcher la dévotion à la Très Sainte Vierge, il est très dangereux, et un fin piège du malin, sous prétexte d'un plus grand bien; car jamais on n'honore plus Jésus-Christ que lorsqu'on honore plus la Très Sainte Vierge, puisqu'on ne l'honore qu'afin d'honorer plus parfaitement Jésus-Christ, puisqu'on ne va à elle que comme à la voie pour trouver le terme où on va, qui est Jésus.

95. La Sainte Eglise, avec le Saint-Esprit, bénit la Sainte Vierge la première, et Jésus-Christ le second: Benedicta tu in mulieribus, et benedictus fructus ventris tui, Jesus. Non pas parce que la Sainte Vierge soit plus que Jésus-Christ ou égale à lui: ce serait une hérésie intolérable; mais c'est que pour bénir plus parfaitement Jésus-Christ, il faut auparavant bénir Marie. Disons donc avec tous les vrais dévots de la Sainte Vierge, contre ses faux dévots scrupuleux: O Marie, vous êtes bénie entre toutes les femmes, et béni est le fruit de votre ventre, Jésus.

96. Les dévots extérieurs sont des personnes qui font consister toute la dévotion à la Très Sainte Vierge en des pratiques extérieures; qui ne goûtent que l'extérieur de la dévotion à la Très Sainte Vierge, parce qu'ils n'ont point d'esprit intérieur; qui diront force chapelet à la hâte, entendront plusieurs messes sans attention, iront aux processions sans dévotion, se mettront de toutes ses confréries sans amendement de leur vie, sans violence à leurs passions et sans imitation des vertus de cette Vierge très sainte. Ils n'aiment que le sensible de la dévotion, sans en goûter le solide; s'ils n'ont pas de sensibilités dans leurs pratiques, ils croient qu'ils ne font plus rien, ils se détractent, ils quittent tout cela, ou il font tout à baton rompu. Le monde est plein de ces sortes de dévots extérieurs, et il n'y a pas de gens plus critiques des personnes d'oraison qui s'appliquent à l'intérieur comme à l'essentiel, sans mépriser l'extérieur de modestie qui accompagne toujours la vraie dévotion.

97. Les dévots présomptueux sont des pécheurs abandonnés à leurs passions, ou des amateurs du monde, qui, sous le beau nom de chrétien et de dévot à la Sainte Vierge, cachent ou l'orgueil, ou l'avarice, ou l'impureté, ou l'ivrognerie, ou la colère, ou le jurement, ou la médisance, ou l'injustice, etc.; qui dorment en paix dans leurs mauvaises habitudes, sans se faire beaucoup de violence pour se corriger, sous prétexte qu'ils sont dévots à la Vierge; qui se promettent que Dieu leur pardonnera, qu'ils ne mourront pas sans confession, et quils ne seront pas damnés, parce qu'ils disent leur chapelet, parce qu'ils jeûnent le samedi, parce qu'ils sont de la confrérie du Saint Rosaire ou Scapulaire, ou de ses congrégations, parce qu'ils portent le petit habit ou la petite chaîne de la Sainte Vierge, etc.
Quand on leur dit que leur dévotion n'est qu'une illusion du diable et qu'une présomption pernicieuse capable de les perdre, ils ne le veulent pas croire; ils disent que Dieu est bon et miséricordieux; qu'il ne nous a pas faits pour nous damner; qu'il n'y a homme qui ne pèche; qu'ils ne mourront pas sans confession; qu'un bon peccavi à la mort suffit; de plus qu'ils sont dévots à la Sainte Vierge; qu'ils portent le scapulaire; qu'ils disent tous les jours sans reproche et sans vanité sept Pater et sept Ave en son honneur; qu 'ils disent même quelquefois le chapelet et l'office de la Sainte Vierge; qu'ils jeûnent, etc. Pour confirmer ce qu'ils disent et s'aveugler davantage, ils apportent quelques histoires qu'ils ont entendues ou lues en des livres, vraies ou fausses, n'importe pas, qui font foi que des personnes mortes en péché mortel, sans confession, parce qu'elles avaient, pendant leur vie, dit quelques prières ou fait quelques pratiques de dévotion à la Sainte Vierge, ou ont été ressucitées pour se confesser, ou leur âme a demeuré miraculeusement dans leur corps jusqu'à la confession, ou par la miséricorde de la Sainte Vierge, ont obtenu de Dieu, à leur mort, la contrition et le pardon de leur péchés, et par là ont été sauvés, et qu'ils espèrent la même chose.

98. Rien n'est si damnable, dans le christianisme, que cette présomption diabolique; car peut-on dire avec vérité qu'on aime et qu'on honore la Sainte Vierge, lorsque, par ses péchés, on pique, on perce, on crucifie et on outrage impitoyablement Jésus-Christ son Fils? Si Marie se faisait une loi de sauver par sa miséricorde ces sortes de gens, elle autoriserait le crime, elle aiderait à crucifier et outrager son Fils; qui l'oserait jamais penser?

99. Je dis qu'abuser ainsi de la dévotion à la Très Sainte Vierge, qui, après la dévotion à Notre-Seigneur au Très Saint- Sacrement, est la plus sainte et la plus solide, c'est commettre un horrible sacrilège, qui, après le sacrilège de l'indigne communion, est le plus grand et le moins pardonnable.
J'avoue que, pour être vraiment dévot à la Sainte Vierge, il n'est pas absolument nécessaire d'être si saint qu'on évite tout péché, quoiqu'il fût à souhaiter; mais il faut du moins (qu'on remarque bien ce que je vais dire):
Premièrement être dans une sincère résolution d'éviter au moins tout péché mortel, qui outrage la Mère aussi bien que le Fils;
Secondement se faire violence pour éviter le péché; Troisièmement, se mettre des confréries, réciter le
chapelet, le saint rosaire ou autres prières, jeûner le samedi, etc.

100. Cela est merveilleusement utile à la conversion d'un pécheur, même endurci; et si mon lecteur est tel, et quand il aurait un pied dans l'abîme, je le lui conseille, mais à condition qu'il ne pratiquera ces bonnes oeuvres que dans l'intention d'obtenir de Dieu, par l'intercession de la Sainte Vierge, la grâce de la contrition et du pardon de ses péchés, et de vaincre ses mauvaises habitudes, et non pas pour demeurer paisiblement dans l'état du péché, contre les remords de sa conscience, l'exemple de Jésus-Christ et des saints, et les maximes du saint Evangile.

101. Les dévots inconstants sont ceux qui sont dévots à la Sainte Vierge par intervalles et par boutades: tantôt ils sont fervents et tantôt ils sont tièdes, tantôt ils paraissent prêts de tout faire pour son service, et puis, peu après, ils ne sont plus les mêmes. Ils embrasseront d'abord toutes les dévotions de la Sainte Vierge; il se mettront de ses confréries, et puis il n'en pratiquent point les règles avec fidélité; ils changent comme la lune, et Marie les met sous ses pieds, avec le croissant, parce qu'ils sont changeants et indignes d'être comptés parmi les serviteurs de cette Vierge fidèle, qui ont la fidélité et la constance pour partage. Il vaut mieux ne pas se charger de tant de prières et pratiques de dévotion, et en faire peu avec amour et fidélité, malgré le monde, le diable et la chair.

102. Il y a encore de faux dévots à la Sainte Vierge, qui sont des dévots hypocrites, qui couvrent leurs péchés et leurs mauvaises habitudes sous le manteau de cette Vierge fidèle, afin de passer aux yeux des hommes pour ce qu'ils ne sont pas.

103. Il y a encore des dévots intéressés, qui ne recourent à la Sainte Vierge que pour gagner quelque procès, pour éviter quelque péril, pour guérir d'une maladie, ou pour quelque autre besoin de la sorte, sans quoi ils l'oublieraient; et les uns et les autres sont de faux dévots, qui ne sont point de mise devant Dieu ni sa sainte Mère.

104. Prenons donc bien garde d'être du nombre des dévots critiques, qui ne croient rien et critiquent tout; des dévots scrupuleux, qui craignent d'être trop dévots à la Sainte Vierge, par respect à Jésus-Christ; des dévots extérieurs, qui font consister toute leur dévotion en des pratiques extérieures; des dévots présomptueux, qui, sous prétexte de leur fausse dévotion à la Sainte Vierge, croupissent dans leurs péchés; des dévots inconstants, qui, par légèreté, changent leurs pratiques de dévotion, ou les quittent tout à fait à la moindre tentation; des dévots hypocrites, qui se mettent des confréries et portent les livrées de la Sainte Vierge afin de passer pour bons; et enfin des dévots intéressés, qui n'ont recours à la Sainte Vierge que pour être délivrés des maux du corps ou obtenir des biens temporels.

La dévotion 'véritable' - VD 105 - 110

A quoi peut-on reconnaître la véritable dévotion mariale? Remarquez qu'ici Montfort n'en donne que des propriétés et ne précise pas encore en quoi elle existe. 
Nous lisons dans la Vraie Dévotion les numéros 105 - 110


105. Après avoir découvert et condamné les fausses dévotions à la Sainte Vierge,
il faut en peu de mots établir la véritable, qui est: 1º intérieure; 2º tendre; 3º sainte;
 4º constante et 5º désintéressée.

106. Premièrement, la vraie dévotion à la Sainte Vierge est intérieure, c'est-à-dire elle part de l'esprit et du coeur, elle vient de l'estime qu'on fait de la Sainte Vierge, de la haute idée qu'on s'est formée de ses grandeurs, de l'amour qu'on lui porte.

107. Secondement, elle est tendre, c'est-à-dire pleine de confiance en la Très Sainte Vierge, comme d'un enfant dans sa bonne mère. Elle fait qu'une âme recourt à elle en tous ses besoin de corps et d'esprit, avec beaucoup de simplicité, de confiance et de tendresse; elle implore l'aide de sa bonne Mère en tout temps, en tout lieu et en toute chose: dans ses doutes, pour être redressée; dans ses tentations, pour être soutenue; dans ses faiblesses, pour être fortifiée; dans ses chutes, pour être relevée; dans ses découragements, pour être encouragée; dans ses scrupules, pour en être ôtée; dans ses croix, travaux et traverses de la vie, pour être consolée. Enfin, en tous ses maux de corps et d'esprit, Marie est son recours ordinaire, sans crainte d'importuner cette bonne Mère et de déplaire à Jésus-Christ.

108. Troisièmement, la vraie dévotion à la Sainte Vierge est sainte, c'est-à-dire qu'elle porte une âme à éviter le péché et imiter les vertus de la Très Sainte Vierge, particulièrement son humilité profonde, sa foi vive, son obéissance aveugle, son oraison continuelle, sa mortification universelle, sa pureté divine, sa charité ardente, sa patience héroïque, sa douceur angélique et sa sagesse divine. Ce sont les dix principales vertus de la Très Sainte Vierge.

109. Quatrièmement la vraie dévotion à la Sainte Vierge est constante, elle affermit une âme dans le bien, et elle la porte à ne pas quitter facilement ses pratiques de dévotion; elle la rend courageuse à s'opposer au monde, dans ses modes et maximes; à la chair, dans ses ennuis et ses passions; au diable, dans ses tentations; en sorte qu'une personne vraiment dévote à la Sainte Vierge n'est point changeante, chagrine, scrupuleuse ni craintive. Ce n'est pas qu'elle ne tombe et qu'elle ne change quelquefois dans la sensibilité de sa dévotion; mais si elle tombe, elle se relève en tendant la main à sa bonne Mère; si elle devient sans goût ni dévotion sensible, elle ne s'en met point en peine: car le juste et le dévot fidèle de Marie vit de la foi de Jésus et de Marie, et non des sentiments du corps.

110. Cinquièmement enfin, la vraie dévotion à la Sainte Vierge est désintéressée, c'est-à-dire qu'elle inspire à une âme de ne se point rechercher, mais Dieu seul dans sa sainte Mère. Un vrai dévot de Marie ne sert pas cette auguste Reine par un esprit de lucre et d'intérêt, ni pour son bien temporel ni éternel, corporel ni spirituel, mais uniquement parce qu'elle mérite d'être servie, et Dieu seul en elle; il n'aime pas Marie précisément parce qu'elle lui fait du bien, ou qu'il en espère d'elle, mais parce qu'elle est aimable. C'est pourquoi il l'aime et la sert aussi fidèlement dans les dégoûts et sécheresses que dans les douceurs et ferveurs sensibles; il l'aime autant sur le Calvaire qu'aux noces de Cana. Oh! qu'un tel dévot de la Sainte Vierge, qui ne se recherche en rien dans les services qu'il lui rend, est agréable et précieux aux yeux de Dieu et de sa Sainte Mère! Mais qu'il est rare maintenant! C'est afin qu'il ne soit plus si rare que j'ai mis la plume à la main pour écrire sur le papier ce que j'ai enseigné avec fruit en public et en particulier dans mes missions, pendant bien des années.

13 janvier 2012

Sur les pas de St Louis-Marie de Montfort (1)


Montfort en son temps

Saint Louis-Marie de Montfort a vécu en France de 1673 à 1716. Cela fait bien longtemps ! On peut donc  se poser la question : Montfort a-t-il encore quelque chose à nous dire aujourd’hui ? Quel est son message et pouvons-nous en tirer quelque chose à notre époque en rapide évolution ?
Montfort a vécu durant la deuxième moitié du règne de Louis XIV (1643-1715). C’était une époque brillante dans l’histoire de France,  tant dans le domaine de la science, de l’art ou de la littérature (Corneille, Molière, Racine). La langue, les mœurs et la mode influençaient les  pays voisins.

Cependant, après 1667, Louis XIV s’est engagé dans un grand nombre de guerres qui ont appauvri l’économie du pays, et le mode de vie luxueux de la Cour a englouti beaucoup d’argent. A l’époque de Montfort, la France fut confrontée à des crises économiques et à des famines (famine de l’hiver 1709), à une diminution de la population et à une opposition politique croissante. C’était aussi l’époque du baroque tardif. Des contemporains de Montfort nous sont encore bien connus : les compositeurs Bach (1685-1750) et Haendel (1685 -1759); le peintre Watteau (1684-1726); les papes: Innocent XII (1691-1700) et Clément XI (1700-1721).

Montfort a vécu dans les premiers jours de l’ère moderne, au temps des grandes inventions. C’était l’époque des ‘Lumières’, les intellectuels ont commencé à réfléchir et à prendre des décisions à partir de leur réflexion. Montfort lui-même n’échappe pas à cette tendance et, à travers sa pensée et ses écrits, il nous offre une nouvelle compréhension des données de la foi.

Présentons la biographie de Montfort à partir de quelques dates importantes, des moments-clefs, des tournants dans sa vie.


Naissance et jeunesse

Montfort est né le 31 janvier 1673 à Montfort-sur-Meu (Bretagne) deuxième enfant de la famille d’un procureur. Il a vécu une enfance heureuse à Iffendic. Ensuite, il a poursuivi ses études secondaires chez les Jésuites, au collège saint Thomas de Rennes où il fut un étudiant sérieux et intelligent.


Montfort décide de devenir prêtre

À 19 ans, Montfort prit la décision de devenir prêtre mais autrement que les prêtres de ce temps. Il décida de partir à Paris afin de s’éloigner de sa famille et aller vers ‘la terre promise’. Il voulait ainsi marcher consciemment sur les traces d’Abraham et s’ouvrir entièrement à Dieu. Sur le pont de Cesson, au-delà de Rennes, il prit congé de sa famille. Au premier mendiant qu’il rencontra, il donna sa bourse, au deuxième ce qu’il possédait encore, puis il échangea ses vêtements contre ceux du troisième. Il mit alors Dieu au défi en disant : « Tu as dit : mets-toi en route, je pars donc » Montfort était convaincu que ce que Dieu avait dit à Abraham était toujours d’actualité. Dieu est toujours le même. Il n’abandonne pas celui qui met sa confiance en Lui.

Montfort étudia la théologie à la Sorbonne à Paris. Cependant, il ne faisait pas partie de ce séminaire mais il appartenait à une communauté de séminaristes pauvres. Là, il multiplia les pénitences et jeûna bien souvent, ce qui mit sa vie en danger. Il dû être hospitalisé et il guérit miraculeusement… au dire de certains ; pour d’autres ce serait surtout grâce à la générosité de quelques bienfaitrices qui, le voyant affamé, lui apportèrent de la nourriture.

Sur les pas de St Louis-Marie de Montfort (2)


Ordination sacerdotale, le 5 juin 1700 à l’âge de 27 ans.

Montfort demanda au supérieur du séminaire l’autorisation de ne plus suivre les cours à la Sorbonne. Cela lui fut accordé et il put alors se former en autodidacte en suivant la méthode de Saint-Sulpice, spécialisée dans la formation des prêtres. Il étudia alors la Bible en profondeur et ces années d’étude personnelle auront une influence décisive dans la vie de Montfort. Sur le conseil de son directeur spirituel, monsieur Leschassier, et bien que lui-même ne s’y sente pas prêt, il fut ordonné prêtre à l’âge de 27 ans dans l’église st Sulpice à Paris. Ce fut un moment-charnière dans sa vie.

Durant les trois premières années de sa vie de prêtre, Montfort n’apparaît pas encore au premier plan. Peu de temps après, nous le retrouvons prêchant des missions. Il habita d’abord parmi les pauvres dans les maisons de pauvres. Il montrait, comme Jésus, une préférence pour les pauvres, les exclus de la société. Gardons à l’esprit que nous sommes alors à l’époque du roi Louis XIV, le roi-soleil, qui vivait dans le luxe à Versailles. Celui-ci voulait une société brillante où il n’y avait pas de place pour les marginaux. Les rues furent ‘nettoyées’ de tous les infirmes, mendiants et autres misérables et ceux-ci furent enfermés dans des ‘hôpitaux généraux’.

C’est dans un de ces hôpitaux généraux, que Montfort séjourna durant trois ans comme aumônier. Il voulut imiter Dieu dans son amour préférentiel pour les pauvres. Et, comme nul autre, il attendait que Dieu réalise en lui sa volonté. Pour y arriver, il choisit délibérément de vivre pauvre. Il mit ainsi en pratique son secret de vie, la consécration. Un des buts principaux de sa consécration réside dans la pauvreté radicale.

Ces trois années de la vie de Montfort, nous pourrions les résumer en une phase contemplative durant laquelle il employait son temps à entrer dans le projet de Dieu et à trouver quelle était sa place dans ce projet. A la fin de cette période, il écrit le livre ‘l’Amour de la Sagesse éternelle’ dans lequel il dit : » Vous avez tant de beautés et de douceurs, vous m’avez préservé de tant de maux et comblé de tant de bienfaits et vous êtes d’ailleurs si inconnue et si méprisée. Comment voulez-vous que je me taise ? » A partir de ce  moment, il sortit de sa retraite et devint un actif missionnaire.

Le tournant : la Pentecôte de Montfort (1703)

Montfort vivait sous un escalier à Paris, rue du Pot de Fer. Ce lieu était pour lui un cénacle où il s’était retiré et plongé dans la prière il méditait sur ce que Dieu attendait de lui. C’est là que, vers sa 30e année, il s’écria : « Comment voulez-vous que je me taise ? » un moment-charnière dans sa vie : l’homme contemplatif entre en action pour annoncer l’amour de Dieu.

Il devient un missionnaire populaire itinérant. Il rencontra souvent l’opposition des Jansénistes,  des spirituels doucereux et des libres penseurs. Mais le peuple lui donna le nom de ’bon père de Montfort’. Il était un prédicateur irrésistible et fit refleurir, par ses prédications, la vie chrétienne dans tout l’Ouest de la France. Il érigea un peu partout des croix, le long des routes de Bretagne.

Pélérinage à Rome

En 1706, à 33 ans, Montfort fut, pour la première fois, éjecté par l’évêque du diocèse de Poitiers. Il décida alors d’aller rencontrer le pape (Clément XI) pour lui demander d’être envoyé en mission hors de France, particulièrement au Canada ou dans les Indes. Mais le pape n’adhéra pas à cette requête et le renvoya en France où il y avait assez de travail pour lui. Montfort se soumit à la décision du pape et retourna en France comme missionnaire apostolique. Entre 1706 et 1710, il fut en effet  un infatigable missionnaire et  prédicateur de missions populaires, développant son propre style d’évangélisation, ne se laissant décourager par rien ni par personne. Bien sûr, il eut huit fois des difficultés avec l’évêque du lieu où il prêchait. Le fait qu’il parlait avec autorité lui valut souvent des problèmes. Cinq fois, il échappa à une agression sur sa personne. En 1712, il échappa de justesse à la mort.

Pontchâteau

En 1710, Montfort vécut à Pontchâteau un nouveau tournant. Il avait mobilisé là une quinzaine de paroisses des environs pour travailler avec lui à la construction d’un Calvaire. Pour cela, il devait également veiller à procurer de la nourriture en suffisance pour  tous ces bénévoles. Le 14 septembre,  jour de la fête de l’Exaltation de la Sainte Croix, il voulait que le Calvaire soit béni. Cependant, la veille de ce jour, il reçut un message de l’évêque de Nantes interdisant la bénédiction du Calvaire.

Il y avait alors environ  20.000 personnes rassemblées dans ce lieu. Montfort  partit cette même nuit à pied jusqu’à Nantes – une distance de 45 km – et arriva tôt le matin chez l’évêque. Mais celui-ci ne se laissa pas convaincre de retirer son interdiction. C’était une question politique. Montfort était accusé d’avoir construit une forteresse pour faciliter l’invasion des Anglais. La colline du Calvaire ne fut heureusement jamais totalement détruite. Elle existe encore aujourd’hui  et constitue toujours un des plus grands centres de pèlerinage de Bretagne.

Montfort, après cette grande contrariété, alla faire une retraite chez les Jésuites à Nantes et ce n’est qu’à la fin de cette retraite qu’il leur raconta ce qui était arrivé. Ils en étaient tous fort surpris à cause de la paix qui émanait de lui.

Sur les pas de St Louis-Marie de Montfort (3)


Mûr pour Dieu

Aux environs de 1712-1713 Montfort fut victime d’une tentative d’empoisonnement qui failli lui coûter la vie. Il y a survécu mais sa santé en resta définitivement ébranlée. Il sentait qu’il n’aurait plus longtemps à vivre.

Depuis lors, jusqu’à sa mort en 1716, Montfort a beaucoup écrit. Il ne voulait pas garder pour lui les découvertes qu’il avait faites sur Dieu ni les emporter avec lui dans la tombe. C’était aussi sa période de maturité, de son accomplissement.

Ses œuvres les plus célèbres sont :

- L’Amour de la Sagesse éternelle (aux environs de 1702)
- La lettre aux amis de la Croix
- le Secret de Marie
- le Traité de la Vraie Dévotion à Marie (1712)
- la Prière embrasée
- les Cantiques
- le Secret admirable du très saint Rosaire.

Sa mort

Le 28 avril 1716, à quarante-trois ans, Montfort mourut lors d’une mission qu’il prêchait à Saint-Laurent-sur-Sèvre, en Vendée. Il y est enterré dans l’église paroissiale.

Béatification - Canonisation

Après un examen approfondi, il est officiellement reconnu, en 1858, que les écrits de Montfort sont en conformité avec les enseignements de l’Eglise. En 1888, le pape Léon XIII déclare Montfort bienheureux et, peu de temps après la seconde guerre mondiale, le 20 juillet 1947, il est canonisé par Pie XII. En 1996, Jean-Paul II inscrit sa fête dans le calendrier de l’Eglise universelle. La même année, de sa propre initiative, le pape avance d’un jour sa visite pastorale en France afin de pouvoir aller à Saint-Laurent prier sur la tombe de saint Louis-Marie.

12 janvier 2012

Le style d'évangélisation propre à Montfort


Son but principal était de rappeler aux chrétiens que Dieu a un projet sur chaque baptisé. Il explique comment Dieu invite la personne baptisée à collaborer avec lui à son grand projet commencé avec Abraham, entré dans sa phase définitive depuis l’incarnation de Jésus-Christ et portée à son accomplissement : « Soumettons nos épaules et portons Jésus-Christ » (VD 240) Dans un monde où domine souvent l’obscurité, les baptisés doivent être des ‘porteurs de lumière’. Par des déclarations et des exercices pratiques de dévotion, il enseignait à son auditoire comment Marie est une aide précieuse pour entrer dans ‘l’intimité’ de Jésus et, avec Lui, s’engager aux affaires de Dieu. C’est à cela que nous sommes appelés.

Découverte de la vraie Dévotion


La Vraie Dévotion (1712-1715) n’est pas seulement l’œuvre la plus célèbre de Montfort, c’est aussi la plus pertinente par son développement spirituel et intellectuel. Elle a été publiée en au moins 400 éditions, en plus de vingt-cinq langues. La caractéristique de ce manuscrit est qu’il resta si longtemps caché. Plus de 70 ans, il resta enfoui quelque part sous la poussière et les toiles d’araignées. Durant la révolution française, il fut caché dans un coffre et, avec quelques autres objets, enterré dans un champ.

Lorsque ces années de turbulence furent passées, il se retrouva à nouveau sur l’étagère d’une bibliothèque. Ce n’est que le 29 avril 1842 qu’il a été reconnu et identifié par les Montfortains comme une œuvre de leur Fondateur. Il s’avéra alors que les premières et les dernières pages du manuscrit avaient disparu. Elles n’ont jamais été retrouvées de sorte que personne ne connaît le titre que Montfort avait attribué à son œuvre.

Le livre contient à peu près tout son message concernant la dévotion à Marie. Il n’est pas un traité du genre théologique. Ainsi, il a utilisé moins d’arguments rationnels que d’images ou de comparaisons que les gens pouvaient comprendre ; En faisant cela, Montfort avait toujours l’essentiel devant les yeux : Jésus-Christ. La dévotion à la très sainte Vierge n’existe qu’en fonction d’une dévotion plus parfaite à Jésus-Christ.

C’est par la  très Sainte Vierge Marie que Jésus-Christ est venu au monde et c’est aussi par elle qu’il doit régner dans le monde.” (VD 1)

10 janvier 2012

La pensée de Montfort.


La Vraie Dévotion n’est pas un moyen magique, mais elle est porte l’empreinte d’un saint. Et les saints savent plus que nous, ils voient plus clairement. Ils sont des visionnaires pour les choses de Dieu.” (Cardinal Danneels)

Dans son petit livre L’Amour de la Sagesse Éternelle, Montfort consacre un chapitre entier au plan de Dieu pour sauver sa création et pour lui donner  une toute nouvelle tournure. Jésus, la Sagesse, prend la décision : «J‘irai chez les hommes ». (ASE 45) Nous trouvons déjà cette décision dans le livre de l’Exode où Dieu le Père dit : « J’ai entendu les cris de mon peuple, je vais descendre. »
(Ex 3, 7-8) Pour réaliser son plan de salut et le mener jusqu’à son accomplissement, Dieu choisit Marie.


Ce que Dieu a promis de réaliser

Comment Montfort voit-il l’agir de Dieu ? Dieu est entré dans l’histoire. Et cela après une longue période de préparation. Aux environs de l’année 1800 avant Jésus-Christ, Dieu s’est fait connaître à Abraham et 1800 ans plus tard, le Christ  lui-même  est venu dans le monde. L’incarnation du Christ a déjà commencé dans le plan de Dieu avec Abraham. Dieu dit à Abraham : Quitte ton pays… et je ferai de toi un grand peuple. » Une promesse.

Et, à travers toute l’histoire, nous voyons que Dieu tient parole. Il se ‘colle’ à ceux à qui il a fait une promesse. Abraham est allé à  l’aventure. Il a transmis sa foi dans la promesse de Dieu à Isaac et à Jacob. Ils n’avaient, dans leur pérégrination tout au long de leur vie, que cette  promesse de Dieu. Leur foi consistait en ceci : Ce que Dieu a promis, il l’accomplira.  Même si les circonstances semblaient, à première vue, affirmer le contraire. Après tout, le peuple de Dieu en Egypte, a fini par devenir esclave.

Il semble que le plan de Dieu, depuis Abraham, ne progresse qu’avec des hauts et des bas. Lorsque la détresse devint extrême, Dieu s’adressa à Moïse : « J’ai entendu les plaintes de mon peuple, je vais descendre. Va trouver Pharaon et va plaider en faveur de mon peuple. » Avec Moïse, nous arrivons à un moment charnière de l’histoire Avec lui fut réalisée l’Alliance.

Mais malgré cette Alliance, le peuple s’égare à nouveau.  Les Hébreux durent endurer un séjour de quarante ans dans le désert (quarante ans était alors la longueur d’une vie). Même après qu’ils soient entré dans la ‘Terre Promise’, leur vie est passée par des moments d’euphorie et par de lourdes épreuves : après les points culminants avec les rois Saül, David et Salomon, il y eut aussi des creux profonds.

Le point le plus bas fut l’exil à Babylone et la destruction du temple de Jérusalem avec la perte de l’arche d’alliance. Dans ces périodes d’infidélité et de désespoir, les prophètes ont toutefois rappelé que Dieu tient toujours parole. C’est aussi une constante dans les relations de Dieu avec les hommes qu’il atteint toujours son but malgré la faiblesse humaine et de sérieux obstacles


Pensant à tous, Dieu s’adresse à quelques-uns
D’un groupe de pauvres, de fidèles, est enfin née Marie et, à elle aussi, Dieu a fait une promesse : ‘Celui qui naîtra de toi sera le Messie’. En Jésus, se réalise en effet la Nouvelle et Eternelle Alliance. En lui, le plan de Dieu pour les hommes s’accomplit définitivement.

Montfort se demande comment Dieu peut encore aujourd’hui agir réellement et ce qu’il peut déduire de sa ligne de conduite. Il est frappé par le fait que Dieu, à travers tout son plan, à travers toute l’histoire des hommes, s’adresse à une seule personne. Pensant à tous les hommes, il choisit Abraham, Moïse, Marie. Dieu ne s’adresse pas pour cela en premier lieu aux personnes les plus douées. Dans son plan, Dieu ne regarde pas les qualités humaines ou les défauts : Moïse n’était pas un bon orateur, il bégayait. Marie était issue des Anawim, des petits, de ceux qui ne peuvent pas compter sur leurs propres forces, qui attendent tout de Dieu.


Dieu se fait ‘dépendant’

Pensant à tous, Dieu s’adresse donc à quelques-uns ; Surtout, Dieu ne va pas vers les gens qui débordent de qualités, mais il s’adresse aux personnes, les questionne, les invite, les appelle. Dieu se fait dépendant. Il prend l’initiative et demande : « Veux-tu… ? C’est l’image que Montfort a de Dieu. Il est un Dieu qui nous prie.

“Me voici.”

Un autre aspect dans tout ce schéma de l’agir de Dieu est que, bien qu’il soit un Dieu qui questionne, il n’y a qu’une réponse possible. La réponse est toujours la même : « Me voici. » Aussi bien Abraham que Moïse l’ont dite. Marie a dit: “Je suis la servante du Seigneur.» C’est la réponse positive du croyant à la demande de Dieu. Quand Jésus est entré dans le monde, il a dit aussi « Voici, je viens pour faire ta volonté. » C’est aussi la prière fondamentale que Montfort a concrétisée dans sa Consécration, le renouvellement des promesses du baptême : « Me voici. »


Marie, le plus court chemin pour aller à Jésus

Marie a clairement sa place dans la grande œuvre de Dieu. Dans le récit de Cana, Marie était là, aussi bien que Jésus. Marie voit que la fête est en train de mal tourner et elle s’adresse à Jésus. Mais il lui répond : « Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue. » Chez Jean, l’heure signifie l ‘aube de l’accomplissement du plan du salut. Marie est celle qui donne à Dieu la chance d’amener son plan à son achèvement. Elle entre dans le plan d’action du salut,  dans l’agir de Jésus.

Et tout à fait à la fin du récit Jean écrit : « Tel fut le premier des signes de Jésus. Il l’accomplit à Cana, de Galilée. Il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en lui. » Cela veut dire qu’il manifesta qui il était dans le grand plan de Dieu, qui enfin établit sa nouvelle et éternelle alliance. Marie était présente à Cana, à l’éclosion de la foi des disciples.

Et quand l’heure de Jésus fut venue, elle est là de nouveau. Juste au moment où la foi des disciples vacillait sérieusement, Marie est là debout, avec Jean, au pied de la croix et reçoit de Jésus au Golgotha une nouvelle mission : « Femme, voici ton fils », qui vacille, qui a besoin de soutien, qui doit encore grandir dans sa foi. Et à Jean Il dit : « Voici ta mère.» Montfort s’est fortement appuyé sur la mission que Marie a reçue envers les croyants.

Dans les Actes des Apôtres, nous voyons comment Marie a pris concrètement sa place au milieu des disciples qui vacillent dans leur foi. Marie était présente, au jour de la Pentecôte, lorsque l’Eglise est née et que les disciples sont devenus des hommes nouveaux habités par Dieu. Montfort réfléchit là-dessus ; il a parcouru les mêmes étapes dans sa vie et il dit : Dieu est venu habiter en moi. C’est possible aussi pour chacun de nous. Montfort nous montre pour cela un chemin aisé et ce chemin aisé passe par Marie.