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18 octobre 2011

Catéchèse à l'école de Marie (1)


Commentaire sur 'La Vraie Dévotion' de Montfort     

Lire la bible n’est pas facile. En effet, la bible n’est pas un simple livre mais plutôt une bibliothèque, une série d’écrits de genres littéraires variés et souvent réalisés dans des situations très différentes. Ils parlent de la ‘voie’ que le Seigneur a choisie pour rencontrer les hommes avec, comme point culminant, ‘l’avènement’ de Jésus dans le monde. On peut étudier les livres de cette bibliothèque de manière savante, distante, mais on peut aussi les approcher pour ce qu’ils sont: la Parole de Dieu, une parole qui demande réflexion et réponse, aujourd’hui aussi. Il est donc question de lire la bible avec un cœur qui écoute. Pour cette lecture le père de Montfort a choisi la Vierge Marie comme guide; auprès d’elle il a appris comment entrer personnellement dans l’agir de Dieu et contribuer à la réalisation de son grand projet. Son écrit La Vraie Dévotion est perçu mondialement comme une aide concrète pour amener les chrétiens à une foi adulte. Le langage dont il se sert est tributaire de son temps, mais ses intuitions sont profondément bibliques.


Une mise en garde dès la première phrase
À plusieurs reprises le Seigneur avertit le lecteur de la bible: « Vos pensées ne sont pas mes pensées. » Cet avertissement nous met sur une piste nécessaire pour découvrir la profondeur de la première phrase du livre de Montfort, énoncé surprenant hier comme aujourd’hui. En effet, quasi spontanément l’homme s’imagine un dieu qui n’existe pas. Le Dieu des chrétiens est un Dieu qui surprend: Il se montre ‘dépendant’. Il promet un ciel nouveau et une terre nouvelle, mais Il tient à ‘s’appuyer’ sur les hommes. Voilà une donnée biblique essentielle, chez Montfort aussi.

Depuis le commencement, Dieu compte sur les hommes. À Abraham, il fait une promesse réitérée sans cesse, ‘sous serment’ précisent plusieurs auteurs. Dieu se tourne vers Abraham avec une demande de grande envergure: quitte tout et pars vers un avenir que tu vas découvrir. Bien plus tard, en la personne de Jésus Christ, d’autres découvriront le sens profond de ces paroles, un aboutissement qui étonne: Dieu qui devient homme et descend au plus profond de la misère humaine, pour le libérer et le conduire définitivement auprès de Lui.
Montfort focalise sa pensée sur le moment décisif de cette ‘voie’ de Dieu et écrit: « C’est par la Très Sainte Vierge Marie que Jésus Christ est venu au monde, et c’est aussi par elle qu’Il doit régner dans le monde. »
Qu’y a-t-il de particulier dans cette première phrase?
Justement ceci: on s’imaginait Dieu tout différent, un Dieu grand, tout-puissant et certainement indépendant. Or, la façon dont Jésus est entré dans le monde dévoile un Dieu extrêmement humble et très proche: « Jésus image du Dieu invisible », comme le dit St Paul. « L’esprit humain se perd, lorsqu’il fait une sérieuse réflexion sur la conduite du Dieu fait homme » écrit Montfort (VD 139).
Un Dieu demandeur
En parcourant l’Ancien aussi bien que le Nouveau Testament, son cœur attentif était fort sensible aux plaintes de Dieu devant l’humanité qui poursuit des pistes trompeuses. Dans L’Amour de la Sagesse Éternelle, il résume: « Ô hommes! ô enfants des hommes! c’est à vous que Je crie depuis si longtemps; c’est vous que Je désire, c’est vous que Je cherche. Ecoutez, venez à moi, je veux vous rendre heureux… J’aime ceux qui M’aiment et celui qui Me cherche diligemment Me trouvera et, Me trouvant, trouvera une abondance de biens… Et soyez persuadés que mes plus doux plaisirs, mes plus chères délices sont de converser et de demeurer avec les enfants des hommes» (ASE 66-67). Dieu tient à échanger avec les hommes et à demeurer chez eux. Dans La Vraie Dévotion Montfort offre des pistes pour répondre au Sauveur qui veut rendre l’homme heureux.

Le lecteur attentif de la bible découvre que, quand Il s’adresse à quelqu’un, que ce soit à Abraham, Moise, David ou telle ou telle autre personne, Dieu demande au moins implicitement: « S’il-te-plaît, veux-tu collaborer avec moi? » De plus, on constate qu’Il ne s’adresse pas à n’importe qui. De Moïse par exemple, l’auteur signale qu’il s’agissait d’un homme selon le cœur de Dieu. Que penser alors de la Vierge Marie, destinée à vivre une proximité du Tout-Autre jamais égalée? Pour Montfort c’est clair: la jeune fille inconnue de Nazareth, sur laquelle Dieu a osé s‘appuyer, devait avoir des qualités uniques. Dans la première phrase citée, il la qualifie de « Très Sainte Vierge. » Ces qualificatifs réfèrent au récit de l’annonce à Nazareth: « Pleine de grâce »; « Le Seigneur est avec toi »; « Tu as trouvé grâce auprès de Dieu »; « L’Esprit Saint viendra sur toi »; « La puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre. » L‘impossible s’est réalisé: en elle, Dieu a établi sa demeure. C’est pourquoi Montfort n’hésitera pas à l’appeler parfois la « divine Marie. »
La question du catéchète
Si Marie est tellement exceptionnelle aux yeux de Dieu, comment se fait-il qu’elle soit restée cachée? C’est à peine si les évangélistes parlent d’elle. Montfort en fait le constat et conclut qu’il y a sans doute des raisons. Son premier réflexe est de référer à l’humilité de la Vierge Marie, l’humilité est une des grandes caractéristiques du Dieu de la bible ; il s’agit du niveau où Dieu et l’homme peuvent se rejoindre. L’excellence de la dévotion qu’il propose, « c’est pratiquer l’humilité qui ravit toujours le cœur de Dieu » écrit-il dans le Secret de Marie (SM 36). Puis il ajoute le raisonnement d’anciens auteurs et cite entre autres l’hypothèse que les parents mêmes de Marie ne savaient pas qui elle était vraiment et en donne une explication acceptable: si ses contemporains l’avaient reconnue de la sorte, ils se seraient égarés sans doute, ils l’auraient considérée comme une déesse! Ensuite, Montfort loue les nombreux saints qui ont écrit des choses merveilleuses en l’honneur de Marie et les chrétiens du monde entier qui la vénèrent par des multiples prières et cantiques. Il cite ceux qui lui catéchèse   à l’école ont dédié des églises et cathédrales, il réfère aux pèlerinages et aux processions pour l’honorer, aux instituts et associations qui portent son nom et termine l’énumération en disant que même les petits enfants la louent par un simple Ave Maria.

« Et pourtant », ajoute-t-il, – et il se sert de majuscules qui sautent aux yeux – « Quant à Marie, jamais assez. » Marie n’est pas assez louée, exaltée, honorée, aimée et servie; elle mérite bien plus. Cet énoncé a fait sursauter ceux qui trouvent que la Vierge Marie est trop vénérée et que les dévotions empêchent les gens de s’adresser à Dieu. Il faut que ces opposants lisent plus loin pour dé-couvrir que la dévotion que Montfort propose conduit directement au Christ.

Vatican II – situant Marie dans l’œuvre de Dieu – prolonge les intuitions de Montfort: « Son amour maternel la rend attentive aux frères de son Fils dont le pèlerinage n’est pas achevé, ou qui se trouvent engagés dans les périls et les épreuves, jusqu’à ce qu’ils parviennent à la patrie bienheureuse… » « La vraie dévotion procède de la vraie foi qui… nous pousse à aimer cette Mère d’un amour filial, et à poursuivre l’imitation de ses vertus… » « La Mère de Jésus représente et inaugure l’Église en son achèvement dans le siècle futur, de même sur cette terre, en attendant la venue du jour du Seigneur, elle brille déjà comme un signe d’espérance assurée et de consolation devant le peuple de Dieu en pèlerinage » (LG 62-68).

 C’est une erreur de croire que par le baptême on est chrétien une fois pour toutes, trop souvent on oublie qu’on doit ‘devenir chrétien adulte’ et que Marie peut nous y aider considérablement.
Le prochain article portera sur Marie dans l’agir de Dieu et sa mission dans l’Église (VD no 14-46).
Frans Fabry
Note:
VD réfère au livre La Vraie Dévotion; 

SM au Secret de Marie; 

ASE à L’Amour de la Sagesse éternelle.

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